La Baignoire de Voyage de Napoléon : Symbole d’Innovation Industrielle Liégeoise au début du XIXe siècle
Tout commence à la fin de 1805, dans le département français de l’Ourthe, qui correspond à peu près au territoire de la Wallonie actuelle. Le grand chef à cette époque, c’est bien sûr Napoléon 1er. Le pionnier de l’industrie du zinc lui se nomme Jean-Jacques Daniel Dony. Un Liégeois, abbé de son état, qui entre deux sermons, s’est mis en tête de raffiner le zinc. Car l’abbé est aussi un excellent chimiste.
Pour mettre en pratique ses théories inédites, il souhaite exploiter une mine très proche de la frontière prussienne (La Calamine, en allemand Kelmis), riche en minerai de zinc et de plomb. Il en demande donc la concession à Napoléon. Et l’obtient, par décret impérial en mars 1806, à la condition qu’il puisse « réduire le zinc de la calamine, dont il est extrait, à l’état métallique dans un four industriel ». La mine s’appelle l’Altenberg, qui signifie en français, la Vieille Montagne. Entre 1808 et 1810, il expérimente donc son ingénieux procédé dans son usine du quartier Saint-Léonard à Liège. Et ça fonctionne très bien. Il sort ses premiers lingots de zinc dont il fait faire des plaques dans un laminoir à Givet, et dépose aussitôt un brevet. En 1809, il écrit à Napoléon pour lui dire qu’il a réussi son pari !
La Baignoire de Voyage : Une Invention Ingénieuse
L’abbé Dony, soucieux de remercier l’Empereur et de promouvoir son produit lui offrit cette baignoire de voyage entre 1809 et 1812. Elle aurait suivi Napoléon dans ses campagnes de Russie (1812), d’Allemagne (1813) et de France (1814).
Pour la petite histoire : le récipient à double fond en zinc laminé était relié à chauffe-eau à double enveloppe permettant de faire circuler de l’eau chaude entre les deux parois et un chauffe-serviettes. La partie inférieure est réservée à un petit foyer à charbon de bois avec une porte et un cendrier mobile en tôle de fer. Deux orifices sont reliés à la baignoire pour la circulation d’eau par thermosiphon. Deux fantassins courageux l’ont transportée lors de la campagne de Russie afin que l’Empereur puisse prendre un bain chaud tous les soirs ! L’Empereur en fit don au Baron Fain, son secrétaire particulier, à la veille de son départ pour l’île d’Elbe.
Le Retour en Wallonie
Cette baignoire, revenue de ce long périple dans ses terres wallonnes, sera rachetée quelques décennies plus tard par l’entreprise de la Vieille Montagne. Mais revenons à 1811. L’abbé réussit à enthousiasmer un couvreur qui s’inspire des techniques d’assemblage utilisées pour les toits en plomb ; il réalise le premier toit en zinc laminé au monde, sur l’église Saint-Barthélemy de Liège, et un an plus tard, il réalise le toit de la cathédrale Saint-Paul de Liège. Les archives de la société « Vieille Montagne » conservent encore la facture que le couvreur a envoyée au conseil de l’église, contenant ses arguments pour utiliser ce nouveau matériau.
Une Pièce Unique à Découvrir
Aujourd’hui, cette baignoire mythique est conservée et exposée à la Maison de la Métallurgie et de l’Industrie de Liège. Elle ne représente pas seulement un témoignage de l’ingéniosité et de la capacité d’innovation de Jean-Jacques Daniel Dony, mais aussi une page fascinante de l’histoire industrielle de la région liégeoise.
L’importance historique de cet objet est indéniable. La baignoire de voyage de Napoléon est plus qu’un simple artefact ; elle symbolise l’esprit d’innovation et la compétence technique qui ont permis à la région de se distinguer sur la scène industrielle mondiale. Elle incarne l’évolution des méthodes de production et l’essor de nouvelles industries au début du XIXe siècle.
Nous vous invitons à venir découvrir cette pièce exceptionnelle et à plonger dans l’histoire fascinante de l’industrie du zinc et de l’innovation technologique à Liège. Une visite à la Maison de la Métallurgie et de l’Industrie de Liège au boulevard Raymond Poincarré, vous permettra de mieux comprendre l’impact durable de ces innovations sur notre patrimoine industriel. Ne manquez pas cette opportunité de découvrir un morceau d’histoire qui a voyagé à travers le temps et l’Europe pour revenir à ses racines wallonnes.
